Georges Zaragoza : La création de l'oeuvre théâtrale de Hugo à Madrid

Communication au Groupe Hugo du 24 novembre 2012
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Les œuvres de Hugo seront très rapidement connues dans la péninsule ibérique, très vite traduites également[1] et, en ce qui concerne le théâtre, très vite représentées sur les scènes les plus importantes d’Espagne ; plus particulièrement à Madrid où la bataille romantique fait rage entre 1834 et 1840. Cette connaissance, bien réelle du drame romantique hugolien, tant en librairie que sur les planches, jouera un rôle non négligeable dans la naissance et l’éclosion du drame romantique espagnol.

En Espagne, comme en France, ces phénomènes littéraires sont étroitement liés aux séismes politiques qui, de part et d’autre des Pyrénées, ne cessent de secouer les sociétés espagnole et française. Un petit rappel des faits historiques nous permettra de mieux mesurer, en contexte, l’importance des représentations madrilènes du théâtre de Hugo.

 

Le fait historique majeur qui va, pour une grande part, déterminer l’évolution politique de l’Europe est, comme on s’en doute, la Révolution française. En 1789, c’est Charles IV qui occupe le trône d’Espagne, alors que c’est la reine Marie-Louise et le ministre favori Godoy qui gèrent les affaires de l’État. Nous avons tous en mémoire ce monumental portrait de la famille royale, peint par Goya et qui occupe une place de choix au Museo del Prado. L’arrestation de Louis XVI et sa condamnation à mort émeuvent particulièrement les cours étrangères ; le ministre Floridablanca écrit en 1792 : « Nous vivons à côté d’un brasier qui peut tout enflammer, détruire la religion, l’autorité souveraine du roi, ainsi que l’existence même de la monarchie et des classes qui la composent[2]. » Les armées française et espagnole entrent en conflit à propos d’un Roussillon élargi au profit de la France. La guerre prend fin en 1795 sans victoire décisive d’un camp sur l’autre et l’Espagne devient l’alliée contrainte de la France, ce qui lui vaut d’être la victime de la bataille de Trafalgar (1805), cuisante défaite dans laquelle la quasi-totalité de sa force maritime est détruite. En 1807, Napoléon « convoque » le roi d’Espagne à Bayonne, le contraint à abdiquer en sa faveur et installe son frère Joseph sur le trône d’Espagne[3]. Les 2 et 3 mai 1808, les madrilènes se révoltent violemment contre les occupants français qui leur infligent une répression sanglante ; ici encore, les deux grandes toiles de Goya consacrées à ces deux jours sont bien connues. L’armée française est défaite à Vittoria par Wellington et Ferdinand VII, fils de Charles IV, monte sur le trône en 1813. La société espagnole est alors fortement divisée entre les légitimistes qui souhaitent un retour à l’absolutisme sans concession, les afrancesados qui considèrent, au contraire, le modèle français comme devant inspirer la politique espagnole, et les libéraux qui rejettent à la fois l’absolutisme et les dangers de la démocratie à la française. L’accession au trône de Ferdinand VII s’accompagne d’une répression brutale : les arrestations et les exécutions sommaires se multiplient et bon nombre d’intellectuels libéraux font choix de l’exil. C’est ainsi que Martínez de la Rosa et Angel de Saavedra, futur Duc de Rivas – deux figures majeures du renouveau dramatique en Espagne - séjournent à Paris[4]. Ferdinand VII devient très impopulaire, les monarchistes eux-mêmes ne le soutiennent plus : « Ferdinand VII n’est pas un homme, c’est un monstre de cruauté ; c’est le plus ignoble de tous les êtres, c’est un lâche […] une calamité pour notre malheureuse patrie. » (novembre 1826, Manifeste de la fédération royaliste). Ferdinand VII meurt en 1833 et sa femme Marie-Christine assure alors la régence de la trop jeune reine Isabelle, jusqu’en 1843.

 

Sur le plan théâtral, il convient de retenir deux faits marquants précédant immédiatement la période qui nous intéresse. En 1806 la création triomphale de El sí de las niñas de Moratín semble ouvrir la voie à des réformes dramatiques visant à libérer la production ibérique du joug du classicisme à la française[5]. Par ailleurs, le jeu du grand acteur Isidoro Maíquez (1768-1820), jeu qu’il impose après avoir rencontré Talma et pris des cours avec lui, permet de faire connaître le répertoire shakespearien – il triomphe particulièrement dans Macbeth et Coriolan – et favorise la naissance d’un théâtre fondé sur un nouveau rapport à l’espace et sur la représentation des passions tragiques inspirée d’une nouvelle esthétique de jeu.

Pendant le règne de Joseph Bonaparte, la scène madrilène devient un champ de bataille où s’affrontent les idéologies contraires dans des œuvres de propagande majoritairement pro-françaises d’abord, puis de plus en plus anti-françaises, particulièrement après les journées des 2 et 3 mai. Le principal théâtre de Madrid, El teatro del Príncipe[6], est dirigé par un officier des armées napoléoniennes, Jean (devenu Juan) de Grimaldi : malgré ses origines, il est très vite adopté par les milieux intellectuels madrilènes. C’est un homme de culture qui connaît très bien l’univers du théâtre tant français qu’espagnol ; il a, de plus, le bon goût d’épouser la plus grande actrice du temps Doña Concepción Rodriguez, créatrice d’un certain nombre de rôles d’héroïnes du théâtre romantique espagnol. C’est lui, entre autres, qui œuvre pour faire représenter les ouvrages du théâtre français en traduction. C’est également grâce à lui que seront créés à Madrid, sur quelques années seulement, les chefs d’œuvre de la production théâtrale romantique espagnole : en 1834 La Conjuración de Venecia de Martínez de la Rosa, 1835, Don Álvaro o la fuerza del sino du Duc de Rivas, 1836, El Trovador de García Gutierrez et Los Amantes de Teruel de Hartzenbuch. Entre 1830 et 1840, décennie qui correspond à la régence de la reine Marie-Christine, la vie culturelle et intellectuelle de Madrid s’enfièvre et se déchire au nom de la défense ou l’attaque du romantisme. Les publications pro ou antiromantiques sont légion.

Bretón de los Herreros, dramaturge et homme de lettres très en vue, fait paraître en avril 1831 dans El Correo literario y mercantil un article au titre éloquent « Classicisme et romantisme ». Il s’agit d’un dialogue entre un partisan de chacune des doctrines ; la conclusion fait intervenir un médiateur qui tente de conclure : « L’effet théâtral est le but premier que se propose un poète dramatique ; c’est sa loi suprême, et il ne doit pas renoncer à un heureux argument parce que, dans l’agencement de la fable, il est impossible de le soumettre aux règles, s’il peut lui assurer un heureux succès. » En 1835, c’est une autre personnalité de premier ordre de la presse et des lettres espagnoles, Eugenio Ochoa qui signe un article dans El Artista titré « Un romantique[7] ». On y lit ceci : « Le romantisme ! Combien d’idées contraires, éveille ce mot dans l’imagination de ceux qui l’entendent ! Semblable à un talisman magique, pour certains, agréablement flatteur comme les accents d’une voix aimée, comme une céleste harmonie, mais pour les autres, le mot “ romantique ” est l’équivalent d’un hérétique, pire qu’un hérétique, un homme capable de commettre quelque crime ; un romantique pour eux c’est l’Antéchrist, le synonyme de Belzébuth. » On aura soin de faire la part de l’hyperbole facile qui caractérise l’expression journalistique du temps, hyperbole dont il n’est pas exclus qu’il faille la mettre au compte de l’humour du journaliste ; mais malgré ces précautions, il est clair que cette entrée en matière de l’article donne bien le ton des échanges qui prévalaient dans les milieux artistiques de la capitale espagnole. La suite de l’article est d’ailleurs une défense vibrante du romantisme ; on retiendra cet argument fort intéressant qui tend à définir les classiques non comme les admirateurs des grands auteurs du passé – les romantiques le sont tout autant – mais comme étant ceux qui préfèrent la routine à l’innovation.

En 1836, une nouvelle charge du « parti » romantique peut se lire dans un article titré cette fois : « Classiques et romantiques » signé d’un certain S.B. et paru dans El Eco del comercio. En voici l’incipit : « Grecs et Troyens,  Capulets et Montaigus […], radicaux et jacobins […] chats et chiens, classiques et romantiques, tout cela se vaut. Quelle rancune ! Quelle fureur ! Quelle haine ! Quelles insultes de l’un et l’autre côté. Pour le classique, toutes les œuvres romantiques sont mauvaises, méprisables, elles sont un répertoire de fous, d’insensés, dépourvus de tout jugement ; le romantique ne voit dans l’œuvre classique que froideur, puérile et stérile soumission aux règles qui sont autant d’obstacles au génie lumineux et fécond. » Et quelques lignes plus loin, l’article cite, pour les opposer, les champions de chaque camp : Saavedra [Rivas], Hugo, Dumas, Ducange d’une part  et Moratín, Molière et Corneille d’autre part. Car, comme on peut le voir dans les références de personnes données ci-dessus, les points de repère du romantisme espagnol sont, sans aucun doute, les auteurs romantiques français.

 

Dans El Artista, paraît en 1835 un article signé C.A. et titré « Le Drame moderne en France ». Ce texte est particulièrement intéressant en ce qu’il est une réponse à un autre article paru dans El Eco del comercio que notre article cite dès ces premières lignes. Nous comprenons que l’article accusateur prétend que le répertoire français s’est métamorphosé en  une école de l’assassinat, de l’inceste, de la violence et de l’horreur et qu’à l’examen de dix de ses pièces – nous apprendrons quelques lignes plus tard qu’il s’agit d’œuvres de Hugo et Dumas – il dénombre quarante-sept délits plus ou moins graves. Le journaliste de L’Artista se gausse évidemment d’une telle méthode critique qui classe les œuvres par rapport à un critère moral et la qualifie de ridicule. Puis il entreprend de défendre Marion Delorme et La Tour de Nesle, réunissant ainsi Hugo et Dumas, ce qui deviendra un topos de la presse et de la critique madrilène de ce temps. Et s’il est fort rare que l’un des deux auteurs soit évoqué sans que l’autre le soit quasi automatiquement, on notera que leur association engage très souvent une comparaison visant la plupart du temps à marquer la supériorité de Dumas. C’est ainsi que notre journaliste se livre au parallèle attendu : « Alexandre Dumas est sans conteste plus théâtral que Victor Hugo ; mais il a d’importants défauts dont le principal est de n’avoir pas de système dramatique. » Et l’article se clôt sur les lignes suivantes : « Nous sommes bien loin de croire que le drame français a atteint une perfection indépassable ; en revanche, nous affirmons et répétons, qu’avec tous ses défauts, il nous paraît bien supérieur aux tragédies de l’époque impériale qui se faisaient applaudir à tout rompre, il y a quelque vingt ans à Paris, grâce à Talma qui sut communiquer la flamme divine qui l’habitait aux cadavres que son ombre approchait. »

Ce topos du parallèle entre Dumas et Hugo, c’est principalement Mariano José de Larra[8] qui s’en fera le champion. Quasi jamais il ne fait de compte rendu concernant l’un des deux dramaturges, sans que le nom de l’autre ne vienne sous sa plume pour reprendre une fois de plus le parallèle attendu. Je ne citerai que l’un des plus développés d’entre eux, celui que Larra entreprend à l’occasion de la création madrilène de Teresa de Dumas le 5 février 1836 et qu’il publie dans El Español. En voici les premières lignes : « Parmi les écrivains dramatiques modernes qui se réclament de la France, Dumas est, si ce n’est le premier, celui qui connaît le mieux l’univers théâtral et ses effets, y compris Victor Hugo lui-même. » Larra s’insurge ensuite contre un critique qui, à l’occasion de la création de Teresa, aurait mis sur le même plan Dumas, Hugo, Ducange et Casimir Delavigne[9]. Pour lui, Hugo et Dumas sont infiniment supérieurs aux deux autres, mais il prend cependant bien soin de distinguer leur génie propre : « Dumas a moins d’imagination, à notre sens, mais plus de cœur ; et quand Hugo émerveille, lui émeut ; moins de brillant parfois et un style moins poétique et fleuri, mais en revanche, il est moins redondant, moins surchargé, moins extravagant. Les passions profondément explorées, magistralement analysées, et habilement restituées sont toujours la clé de voûte de ses drames. […] Plus d’innovation et d’imagination chez Hugo et plus de poésie. Victor Hugo exploite presque toujours une situation vraisemblable et plausible, Dumas une passion authentique[10]. » Le parallèle se poursuit encore, prolongé par une analyse plus sévère encore à l’égard de Ducange et Delavigne, et s’achève sur cette observation pleine d’humour : « En un mot, Victor Hugo, Dumas, C. Delavigne et Dumas n’ont qu’un seul point commun, celui d’être français. »

On l’aura compris, la création sur la scène madrilène des drames français, dans la période qui nous occupe, sera vécue comme un événement de premier plan et particulièrement les drames de Victor Hugo. Nous allons rendre compte des représentations de quatre d’entre eux,  représentations qui se situent entre 1835 et 1837, période où le romantisme dramatique espagnol produit également ses principaux chefs d’œuvre.

 

Il s’agit de Lucrèce Borgia, créée à Madrid en 1835, d’Angelo, tyran de Padoue, créé également à Madrid la même année, puis à Séville et à Barcelone, Hernani, créé à Madrid en 1836 et de Marie Tudor créée à Valence en 1837 puis à Madrid[11].

Notons que dans son article « Le drame romantique français dans l’espace péninsulaire : de Victor Hugo à Alexandre Dumas[12] », Ana Clara Santos se trompe en déclarant que le Cromwell de Hugo a été représenté à Madrid en 1838. On peut, pour s’en persuader, consulter El Eco del comercio de janvier 1838. Un compte-rendu de la création du Cromwell en question (16 janvier 1838 au Teatro del Príncipe) est présenté sans mentionner le nom de l’auteur, ce qui n’arrive jamais quand le drame est en effet de Victor Hugo ; de surcroît, le résumé de l’intrigue qui en est donné, atteste qu’il ne s’agit pas de celui de Hugo, puisque, entre autres faits, le drame s’achève sur l’exécution du roi Charles 1er[13]. De plus, le même journal publie le 5 février 1838 un article titré « Des exigences du théâtre moderne et de son omnipotence » où il est question des moyens scéniques nécessaires aux représentations des drames romantiques et l’auteur de l’article cite comme exemple le Cromwell de Hugo, référence assortie de la note suivante : « Le Cromwell de Hugo n’est pas le mauvais drame qui a été représenté il y a quelques jours. » Nous voilà assurés donc que le drame de Hugo n’a pas été représenté à Madrid pendant la période que nous envisageons et nous n’examinerons donc que la création des quatre drames cités précédemment.

Nous ne conduirons pas cet examen en suivant la chronologie, mais l’ordre croissant de l’importance que l’on peut accorder à l’événement.

 

C’est donc à Valence qu’est créée Marie Tudor le 26 janvier 1837. Le texte de Hugo est traduit par José Gonzalez de Velasco et publié la même année[14]. La traduction est globalement de qualité et respectueuse du texte français[15]. La dédicataire est la créatrice du rôle éponyme, à Valence, Doña Concepción Samaniego, actrice fameuse du Teatro del Príncipe de Madrid aux alentours des années 1830[16].

Le Diario Mercantil du 30 janvier rend compte de cette première représentation. L’article, de longueur assez conséquente, est globalement élogieux, mais comme la plupart des comptes-rendus de cette époque, qu’ils soient français ou espagnols, ils ne donnent aucun renseignement précis sur le traitement de l’espace scénique, ni sur le jeu de chaque acteur et la plupart du temps les éloges ou réserves sont rarement analysés à partir d’exemples qui nous permettraient de mieux imaginer le type de représentation qui a été donnée. Le journaliste, en l’occurrence, cherche tout d’abord à cerner quel est le sujet exact du drame et pour ce faire, il cite Mme de Staël (L’Influence des passions, 1796): « L’amour est l’histoire de la vie des femmes, c’est un épisode de la vie des hommes » et en conclut : « La chute de Fabiani est un épisode du drame, l’amour de Marie en est l’âme. » Puis, il resitue le drame dans la lutte des romantiques contre les classiques, comme il était permis de s’y attendre ; et évoquant Figaro (J.M. de Larra), il souligne que l’un des caractères dominants du romantisme s’exprime par une forme d’excès : « Cet excès – poursuit-il – (s’il nous est possible de parler ainsi) de sentiments et d’émotions, ce haut degré de passion qui sont les influx nerveux même du romantisme, ne peuvent être compris que de cet âge, que de cette fantaisie qui habite un monde idéal et poétique, celui de la jeunesse. » Cette remarque rejoint celle que beaucoup de critiques faisaient au-delà des Pyrénées, à savoir que le combat romantique était avant tout un combat de génération qui n’avait pas seulement des raisons d’être esthétiques. Après des généralités historico-littéraires assez longuement développées, il en vient à la représentation en elle-même ; il déplore, entre autres, une invraisemblance – légère dit-il – preuve toutefois que son jugement n’est pas tout à fait débarrassé des critères classiques, invraisemblance relative au fait, qu’au premier acte, Gilbert accepte sans autre forme de procès, la bourse de Fabiani pour se débarrasser du juif. Il achève son article en faisant l’éloge appuyé des deux comédiennes qui tiennent les rôles féminins, qui éclipseraient, selon son dire, les rôles masculins[17], mal distribués, semble-t-il. En somme, un compte-rendu qui ne nous en dit pas autant que nous aimerions en savoir.

           

Angelo, tyran de Padoue, est représenté pour la première fois sur la scène du Príncipe, à Madrid, le 23 août 1835. Les deux rôles masculins sont distribués remarquablement : celui d’Angelo est tenu par Carlos Latorre et celui de Rodolfo par Julian Romea. Il est peut-être nécessaire de dire quelques mots de ces deux grands comédiens du temps dont nous aurons de nombreuses occasions de citer les noms.

            Carlos Latorre (1799-1851) débute sur les planches madrilènes à 24 ans dans le rôle d’Othello qu’Isodoro Maíquez avait marqué de son empreinte et fut reconnu comme son digne successeur. Il triompha dans tous les grands rôles shakespeariens, fut un Œdipe mémorable et créa les rôles de Don Álvaro (de Rivas) et de Manrique (Le Trouvère de García Gutierrez). « Son port était majestueux, sa voix vibrante et très sonore ; ses attitudes avaient une noble dignité[18]. » Il sera également un grand professeur de déclamation théâtrale au tout jeune Conservatoire créé par la Régente Marie-Christine. Il laissera d’ailleurs quelques « notes sur l’art de la déclamation », notes  précieuses pour mieux appréhender le style de jeu de l’époque.

            Julian Romea (1813-1868), de 14 ans plus jeune que Latorre fut son élève au Conservatoire et très souvent son partenaire, lorsque la distribution réclamait deux comédiens de premier plan, comme pour Angelo, tyran de Padoue[19]. Il était le galán (jeune premier) idéal de la comedia, alliant élégance et charme, avec un fond de mélancolie qui en faisait un comédien idéal du drame romantique ; mais sa palette interprétative était telle qu’il fit un triomphe dans Les Enfants d’Édouard de Casimir Delavigne, où il composait un magistral Gloucester. Il prônait un jeu naturel qu’il professa au Conservatoire dont il fut également directeur[20]

            Ajoutons que le rôle de Catalina était tenu par Bárbara Lamadrid[21], autre étoile de la scène madrilène et du Príncipe particulièrement.

            Dans El Artista, Eugenio de Ochoa[22] fait paraître un court article titré très simplement « Angelo ». Dans cet article, il mentionne très rapidement que la pièce a été très applaudie et que les comédiens étaient admirables. En revanche, il développe un point de vue sur l’œuvre de Hugo qui mérite qu’on s’y arrête. Cette œuvre ne peut être appréciée, dit-il, que si on l’envisage dans sa totalité : « Victor Hugo incarne un pensée sociale, une philosophie neuve, profonde, celle que, de son point de vue, réclame le siècle où nous vivons. » Ochoa se réfère à l’œuvre de Hugo comme il le ferait pour un édifice qui invite à une vue d’ensemble ; il souligne même qu’elle est loin d’être achevée et que, de ce fait, elle ne peut être jugée à sa juste valeur. On sera sensible à ce qu’un auteur espagnol exprime, en 1835, un point de vue qui nous paraît si pertinent à nous qui bénéficions de plus d’un siècle de recul. Il poursuit l’éloge de Hugo en ces termes : « Personne, à l’exception de Shakespeare, ne comprend mieux que lui la haute mission du poète dramatique » ; « Molière s’adressait à la société – ajoute-t-il – Voltaire à un parti, mais Hugo, comme Calderón s’adresse à l’homme. »

           

Lucrèce Borgia, créée peu de temps avant Angelo, tyran de Padoue, c’est-à-dire le 18 juin 1835 sur la scène du Príncipe, semble donc être la toute première œuvre dramatique de Hugo à être représentée à Madrid. La création est annoncée dans El Eco del comercio et le titre de la pièce est assorti de la formule « drame fameux […] du célèbre Victor Hugo », preuve, s’il en était besoin, que le jeune dramaturge français jouissait d’une solide réputation avant même que soit représentée une première pièce de son répertoire.

            C’est E. de Ochoa que nous consulterons encore ; il s’enthousiasme en ces termes : « Louée soit l’institution qui a eu l’heureuse idée de porter sur notre scène cette œuvre de Victor Hugo ; personne ne pourra dire encore qu’il ignore ce que l’on appelle le romantisme ; s’il l’ignorait, qu’il vienne voir Lucrèce Borgia et il l’apprendrait, parce que Lucrèce Borgia avec ses grands défauts et ses sublimes beautés est l’incarnation de ce genre grandiose créé par Calderón et Shakespeare, cultivé avec tant de succès par Goethe et Schiller et haussé à une telle altitude par les deux colosses que sont Victor Hugo et Alexandre Dumas. » Ochoa reconnaît cependant que l’œuvre n’a pas plu et l’analyse qu’il fait des raisons de cet insuccès révèle une approche très fine du théâtre de Hugo : celui qui ne peut apprécier un dessin de Michel-Ange, celui qui ne peut apprécier une symphonie de Beethoven, dit-il, rira au cinquième acte de Lucrèce Borgia. On appréciera l’association, si juste de Michel-Ange, Beethoven et Hugo qui partagent un certain sens de la démesure portée aux limites du bon goût. Il poursuit son analyse en montrant que le public n’a pas été favorable à l’œuvre parce qu’il a été troublé, troublé au plus profond de son être et que la pièce de Hugo s’impose par la violence mais ne touche pas le goût. Il faut, di-t-il encore, que, face à une telle œuvre, le public surmonte son appréhension et alors il sera prêt à applaudir.  Ce que dit en 1835 l’écrivain espagnol rend compte tout autant, me semble-t-il, de la réception du théâtre du Hugo, non seulement face aux spectateurs français des années 1830-40, mais même face aux spectateurs de notre temps. Tout metteur en scène, tout comédien qui s’attaquent à une œuvre dramatique de Hugo prend le risque de l’excès, mais il est bien pire de vouloir l’éviter et le contourner, le ridicule sanctionne immédiatement ce manque d’audace. Ochoa ne s’y trompait pas, le drame de Hugo est violent et terrible (terriblement drôle même) et il lui faut un spectateur prêt à accepter cette déraison, à la partager.

            Eugenio Ochoa souligne que, dans le même temps, Norma d’Alexandre Soumet a connu un immense succès, une façon de prouver que le public est encore séduit par les bons sentiments, les audaces mesurées ce qui n’est certes pas la marque des drames hugoliens. Il conclut son article ainsi : « Sous cet angle [son insuccès], Lucrèce Borgia a rendu un grand service à notre pays ; cette œuvre contribuera d’une manière décisive à réveiller notre ancien amour du théâtre et des grandes œuvres dramatiques que d’ingénieux espagnols ont offert au monde en des temps heureux. »

           

Enfin, nous examinerons la création madrilène d’Hernani, donné le 24 août 1836 au Teatro del Príncipe à Madrid. Cette création, plus que les autres peut-être, mérite une attention particulière dans la mesure où c’est le drame de Hugo qui, d’une part,  emblématise le plus justement, en raison de sa bataille, la révolution théâtrale telle que l’ont voulue les romantiques et qui, d’autre part, en raison de son rapport direct à l’histoire d’Espagne, était le plus susceptible d’éveiller la curiosité et l’intérêt du public espagnol. La traduction du texte de Hugo est assurée par E. de Ochoa lui-même et publié la même année à l’Imprenta de Don José Mario Repulles, à Madrid. La pièce est traduite en vers comme l’annonce la page de titre, « en verso castellano, en variedad de metros », ce qui suppose que le drame n’est plus en vers réguliers – les alexandrins hugoliens -, comme il l’était en français, mais en vers de divers mètres, à la manière du théâtre du Siècle d’or et du théâtre romantique espagnol. Ainsi doña Josefa, qui est la première à s’exprimer, le fait ainsi :

 

                        «  Sí sera el ? por supuesto …

                        es en el escalera falsa

                        Abramos.

                                           Señor galan,

                        Os saluda vuestra esclava » ;

 

réplique où, bien entendu, le fameux « escalier / dérobé » est sacrifié aux exigences de la traduction. Le redoutable monologue de Carlos est ainsi un ensemble de cent cinquante vers qui s’organise en une succession de distiques d’alexandrins et d’octosyllabes.

            Le drame a été assez fraichement accueilli, semble-t-il. El Eco del comercio rend compte de la création en des termes assez agressifs, non dénués d’aigreur nationale à l’égard de la littérature française, comme en témoigne ce quasi-préambule : « nous nous voyons malheureusement obligés de recevoir d’au-delà des Pyrénées les drames qui vont briller sur les scènes immortalisées par Moreto et Calderón. » D’emblée, le journaliste souligne l’écart qui existe entre l’histoire et les coutumes des deux peuples français et espagnol pour en conclure qu’une pièce française qui chercherait à rendre compte des mœurs espagnoles serait vouée à l’échec. Si encore Hugo avait pour seule ambition de s’en tenir aux faits historiques, mais il mêle des événements de haute fantaisie à ceux attestés par l’histoire et cela paraît insupportable au journaliste. Il dénonce violemment l’inspiration, avouée par Hugo dans sa préface, celle qu’il devrait au Romancero. Il juge ridicule de voir un roi que l’histoire nous montre sévère et exigeant, s’introduire comme un voleur dans la chambre d’une jeune fille, et il s’offusque de la familiarité excessive de certaines de ses répliques.

            Il concède, en revanche, qu’il y a quelques passages de grand mérite dans Hernani : le monologue de Carlos qu’il qualifie de sublime car on y reconnaît l’ambition démesurée du roi, ses projets tyranniques et obscurs. Mais le journaliste ne peut s’empêcher de signaler un emprunt de Hugo à Lope de Vega qu’il considère comme du pillage. Hugo fait dire à doña Sol :

 

            « Moi, je suis fille noble, et de ce sang jalouse,

            Trop pour la favorite, et trop peu pour l’épouse ; » (II, 1)

 

vers dans lesquels il reconnaît un extrait de Sancho Ortiz de las Roelas, où le Roi dit ceci : 

 

            « Paréceme que la escucho

            soy dijo, a mi furor loco

            para esposa vuestra, poco ;

            para dama vuestra, mucho[23]»

 

On peut en effet reconnaître l’alexandrin final de doña Sol avec inversion des termes présentés dans les deux derniers vers de ceux de Lope.

            Le journaliste se livre ensuite à un examen de la pièce acte par acte. On conservera pour mémoire qu’au premier acte, il trouve la fureur jalouse d’Hernani sans raison et excessive, alors que son monologue final, dit-il, a été très applaudi. À l’acte III, c’est la scène finale du serment entre don Ruy et Hernani qui a été saluée d’applaudissements. Mais les choses se gâtent singulièrement avec le dernier acte : ses dernières scènes ont été sifflées. Le dernier dialogue entre don Ruy et Hernani aurait pu être terrible, mais les interventions de doña Sol ruinent complètement l’effet potentiel. L’acte paraît superflu, à tel point que dès la deuxième représentation l’acte final a été purement et simplement supprimé.

            Les comédiens sont loués pour leur performance et leur talent : Bárbara Lamadrid dans doña Sol, Julian Romea en Carlos, José Luna, dont le journaliste précise qu’il a su faire rire dans le rôle de don Ruy ; seul Carlos Latorre, en Hernani, appelle une réserve : il abuserait de changements trop fréquents d’intensité vocale ce qui lasserait l’écoute du spectateur.

            José Mariano de Larra, lui aussi publie un long article consacré à cette création madrilène, dans El Español, le 26 août 1836[24]. Il procède à une analyse plus fouillée que celle de l’Eco del comercio, moins partisane aussi semble-t-il, cherchant à mettre au jour, avec plus de justesse, les raisons de ce semi-échec d’Hernani. Son article s’ouvre par un hommage rendu à Hugo : « C’est, écrit-il, l’œuvre de l’un des plus grands poètes du temps, qui a ouvert magistralement la voie de la nouvelle école française moderne », puis il reprend le parallèle avec Dumas que nous avons déjà évoqué : « Nous l’avons dit et répété plusieurs fois, Victor Hugo est plus poète qu’auteur dramatique ; non parce que la connaissance du théâtre lui fait défaut, mais parce que son imagination étouffe presque toujours en lui la voix du cœur et c’est en cela que nous l’avons considéré comme un degré au-dessous de celui qu’occupe Alexandre Dumas. »

            Larra présente également le succès remporté par la pièce de Hugo en France comme essentiellement circonstanciel : « Hernani a transporté le public français, amateur de déclamation et de tableaux historiques ; la nouveauté, le nouvel étendard sous lequel était mis en scène le proscrit d’Aragon, tout cela assurait un triomphe qu’on ne peut cependant pas mettre au compte d’un parti pris esthétique que le drame a contribué à faire naître. » Les bonnes raisons de cet accueil favorable ne sont plus de saison lors de la création espagnole ; la scène madrilène, dit encore Larra, s’est déjà débarrassée des excès de la nouvelle école, et écrivant cela il paraît confondre mélodrame et drame. Les effets d’Hernani sont moins surprenants que ceux de Lucrèce Borgia déjà présentée au Príncipe.

            Larra fait ensuite un éloge marqué de la traduction de Ochoa, rappelant – ce qui est exact – qu’il est généralement fort sévère avec les traductions théâtrales. « Enfin, nous conclurons l’éloge de cette traduction en disant que des scènes entières sont écrites de telle sorte que Calderón lui-même ne les dédaignerait pas. »

            Puis, il se livre à une analyse acte par acte de l’intrigue du drame, précisant cependant avec beaucoup d’intelligence que, pour les drames ordinaires, on peut résumer l’intrigue mais que pour Hernani : « Son principal mérite ne consiste pas à savoir si la jeune première va épouser le jeune premier, ni les différents obstacles qui viennent retarder la célébration de la noce. » C’est « la peinture de Charles 1er d’Espagne juvénile séducteur, roi galant en ses premières années et Charles V d’Allemagne, nouvel empereur romain, débarrassant son âme des mesquines amours mortifères pour laisser place à la haute ambition humaine, à la grandeur universelle que la Providence l’appelle à embrasser. » Il en conclut, bien entendu, que le titre de l’œuvre est peu pertinent et que la pièce se dénoue au quatrième acte. Le cinquième acte est le fruit de l’obstination du poète à vouloir peindre l’honneur castillan, « fantasque et excessif, tel qu’il l’envisage » et qui seul justifie ce cinquième acte. Et Larra de conclure, à propos de cet « honneur castillan » : « À notre époque, nous représenter un serment respecté et tenu jusqu’à la mort, est vraiment quelque chose qui fait mourir de rire le plus sérieux des spectateurs. »

            Le dénouement est donc jugé malhabile, pas assez préparé par le drame, ne s’appuyant que sur la promesse qu’Hernani fait à Ruy Gomez, ce qui explique, conclut Larra que Hernani n’a pas été applaudi malgré le plaisir procuré par les quatre premiers actes. Ce jugement de Larra, même si l’on ne le partage pas, souligne fort bien l’une des difficultés majeures de la mise en scène d’Hernani, qui est de tenir l’équilibre parfait entre le rôle des trois hommes. Jamais le sous-titre Tres para una n’a paru plus éclairant, avertissant le metteur en scène de ne jamais oublier le poids de chacun des prétendants à la main de doña Sol. Négliger ou favoriser l’un d’entre eux, c’est mettre en péril la logique dramatique de l’œuvre[25].

           

Au terme de cette exploitation des documents relatifs aux créations des drames de Hugo sur la scène madrilène entre 1835 et 1837, c’est-à-dire à la période très exacte où les drames romantiques espagnols sont eux-mêmes présentés, il est incontestable que ces créations ont joué un rôle de premier plan. Mais il est bon de remettre en perspective les observations qui précèdent. Tout d’abord gardons en mémoire que, pendant la même période, Dumas triomphe tout autant, peut-être plus que Hugo, que Delavigne, Ducange mais aussi Scribe connaissent des succès très importants. Signalons aussi que les traductions des romans de Hugo sont aussi saluées avec enthousiasme par la presse espagnole[26]. Cependant, il nous est possible d’affirmer, bien que le sujet de ces pages ne nous a pas permis d’en faire la preuve, que le drame romantique espagnol, celui que pratiquent Martínez de la Rosa, le Duc de Rivas, García Gutierrez, Hartzenbusch et Gil y Zárate ou encore Patricio de La Escosura ne doit rien à la dramaturgie hugolienne.

            On retiendra que les quatre pièces de Hugo dont il a été question dans les pages qui précèdent ont été montées comme des événements de première importance ; qu’elles l’ont été avec un soin évident comme le montrent la qualité et la renommée des comédiens qui ont été requis pour donner vie aux héros de ces œuvres. Il semble que, pour certaines, elles aient obtenu moins de succès qu’en France, mais les réserves que nous lisons sous la plume des journalistes madrilènes et l’accueil du public dont ils se font l’écho rejoignent au fond assez sensiblement ce que nous lisons dans la presse française au moment de la création de ces mêmes pièces : on dit à l’envi que Hugo est plus poète que dramaturge, que la construction de ses pièces n’est pas cohérente, qu’il bouscule l’Histoire avec trop de désinvolture. Comme le disait Ochoa, on ne peut apprécier le drame hugolien que si l’on goûte le dessin de Michel-Ange et la symphonie beethovénienne ; avec Hugo, il faut renoncer aux catégories esthétiques bien circonscrites et accepter que la poésie lyrique, l’épopée se mêlent au drame. Hugo, sur les planches, fascinait et agaçait en 1830-1837 comme il fascine et agace encore, ce qui est signe de vitalité.

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Carlos LATORRE                                                                                                Julian ROMEA

 


[1] On consultera à ce sujet l’ouvrage de Francisco Lafarga, Traducciones españolas de Victor Hugo, repertorio bibliográfico, Barcelona, PPU, 2002.

[2] Toutes les citations espagnoles, sauf indications contraires, sont traduites par moi-même.

[3]  Joseph Bonaparte, surnommé Pepe Botella par les Espagnols, règnera de 1808 à 1813. C’est en 1811-12 que le jeune Victor Hugo vivra à Madrid avec sa mère et ses frères.

[4] Martínez de la Rosa écrit en français Aben Humeya, drame historique qu’il fait représenter au Théâtre de la Porte Saint-Martin le 19 juillet 1830. Angel de Saavedra compose une première version en français de Don Álvaro pendant cette même période.

[5] En 1792, Moratín écrit et fait représenter La comedia nueva o El Café, « comédie [qui] offre un tableau fidèle de l’état actuel de notre théâtre » (avertissement de la pièce) où Moratín fait l’apologie du théâtre du Siècle d’or, qui, certes, est conçu en dehors des règles mais ennuie moins que le théâtre contemporain délibérément néo-classique.

[6] Actuellement Teatro Español, plaza Santa Ana à Madrid.

[7] L’article s’accompagne d’une gravure représentant un jeune homme barbu et chevelu, parfaitement vêtu à la mode du temps, l’image parfaite du « lion » qui s’imposait dans la société parisienne de 1830.

[8] J.M. de Larra (1809-1837) est une des figures majeures du romantisme littéraire espagnol. Il vit une partie de son enfance à Bordeaux, ce qui en fait l’un des meilleurs connaisseurs de la littérature française. Il s’illustre dans le journalisme, signant ses articles « Figaro », et compose quelques œuvres théâtrales. Il se suicide en 1837.

[9] Ducange et Delavigne sont également abondamment traduits et représentés pendant la même période.

[10] Larra, Artículos – Poesías sélectas, ed. Carlos Seco Serrano, Madrid, Ediciones Atlas, 1960, p. 147-150.

[11]  Marion Delorme est traduite en 1864, Le Roi s’amuse en 1838, Ruy Blas en 1844.

[12]  Centro de estudos de teatro, faculdade de letras, universidade de Lisboa, www.fl.ul.pt/cet-publicacoes/cet-edicoes-online/cet-artigos/616-le-drame-romantique-francais-

[13] « Ce n’est rien de plus – commente le journaliste – qu’une collection de faits et de mots historiques mis bout à bout, jusqu’à l’ultime, l’exécution du roi. »

[14] Maria Tudor, drama en tres jornadas, original de Victor Hugo, traducida por D. José Gonzalez de Velasco, Valencia, Imprenta de D. Ildefonso Mompié de Montagudo, 1837.

[15]  Sur ce sujet, on pourra consulter G. Zaragoza, « A propósito de Marie Tudor, los problemas de la traducción del texto teatral »  in Neoclásicos y Románticos ante la traducción, Universidad de Murcia, Servicio de publicaciones, 2002.

[16] Maria Tudor fut reprise à Madrid le 9 mai 1837 et d’après le manuscrit que l’on peut consulter à la Biblioteca historica de Madrid, le rôle de Maria fut à nouveau attribué à Concepción Samaniego, alors que Gilberto était joué par Carlos Latorre et Fabiani par Julian Romea.

[17] Juana : D.a C. Montaño, Gilberto : D. G. Perez, Fabiani : D. P. Montaño.

[18] Luis Calvo Revilla, Actores célebres del Teatro del Príncipe o Español, Madrid, Imprenta Municipl, 1920, p. 75.

[19] Voir note 16.

[20]  Voir Julian Romea, Manual de declamacion para uso de los alumnos, México, Imprenta de J.M. Aguilar Ortiz, 1878.

[21] Bárbara Lamadrid, (1812-1893) débute triomphalement dans le mélodrame traduit de Ducange, L’Orpheline de Bruxelles en 1832. Elle crée un certain nombre de grands rôles du théâtre romantique espagnol et sera souvent la partenaire de Carlos Latorre ; ce sera le cas, entre autres, dans le Don Juan Tenorio de José Zorrilla créé le 28 mars 1844.

[22] Eugenio de Ochoa (1815-1872) est l’un des plus fervents partisans du romantisme et du théâtre français, tout particulièrement celui de Hugo qu’il traduit. Il entretient des rapports épistolaires amicaux avec l’auteur d’Hernani et séjournera en France aux environs de 1838 pour diriger une collection chez Baudry, Tesoro del teatro español, desde su origen (año de 1356) hasta nuestros días. Il crée et dirige la revue hebdomadaire El Artista, très favorable au romantisme  (1835-36).

[23]  Lope de Vega, Sancho Ortiz, tragedia, Madrid, Imprenta de Sancha, 1800, p. 15.

[24] Larra, op. cit., p. 268-70.

[25] On se souvient du choix d’Anne Delbée en 2002 qui, en confiant le rôle de don Ruy à François Beaulieu (Hernani en 1974 à la Comédie-Française), en faisait soudain le héros du drame.

[26]  La traduction du Dernier jour d’un condamné est publiée en 1834, celle de Burg-Jargal en 1835, celle de Han d’Islande en 1835-36, celle de Notre-Dame de Paris en 1836.